Autobiographie spirituelle

Ma socialisation religieuse a été marquée par la lecture communautaire de la Bible que j’ai vécue pendant de nombreuses années avec un groupe de jeunes gens dans ma paroisse. Mais aussi par des voyages annuels avec ce groupe dans différentes régions de France, à la rencontre de la mystique cistercienne, ou plus tard orthodoxe. Taizé était encore un laboratoire stimulant pour pratiquer une forme de spiritualité capable d’attirer les jeunes avec un langage et une méthode renouvelés. Le chant grégorien, la réduction à l’essentiel tenté par la discipline monastique, l’incroyable richesse de l’art chrétien européen m’ont ouvert des espaces de réflexion et impressionné durablement. Une mention particulière vaut pour l’art, la cosmologie et l’anthropologie romane que j’ai considérées depuis comme une sorte d’idéal d’équilibre entre l’homme, la nature et Dieu.

Mon séjour à Berlin et les découvertes faites en République Démocratique Allemande RDA ont confirmé et renforcé cette conscience que l’Église n’est pas d’abord une entité locale, mais un phénomène et une réalité mondiale, dont la pluralité des manifestations est une source d’inspiration avant que d’être une frontière ou un déviant. Cette réalité globale du christianisme, mais aussi la confrontation avec la critique modern (freudienne, marxiste, nietzschéenne) de l’action de l’Église dans l’histoire rencontrée en Allemagne se sont reliées dans mes convictions : l’Église, prise globalement, est fidèle à sa vocation surtout quand elle agit pour le bien des autres.

Deux phrases source qui ont marqué mes orientations le montrent chacune à leur manière. La première est celle du Père Amédée, prieur de l’Abbaye cistercienne de Bricquebec, en Normandie. C’était le premier moine que je rencontrais dans ma vie. Je fus fasciné par le visage frais, rayonnant et perpétuellement souriant de cet homme, aux antipodes de ce que j’associais avec le mot « moine». Nous l’avions rencontré lors de notre premier voyage de groupe, quelques semaines après mes seize ans : « Dieu t’aime personnellement, passionnément, divinement ». Cette phrase, il nous la répéta chaque jour pendant notre séjour, et je m’en souviens encore. Ce résumé de la foi chrétienne m’avait bouleversé, tout comme m’avait bouleversé le début d’une prédication de Dom Helder Camara, archevêque de Recife au Brésil, figure de proue de la lutte contre l’injustice sociale dans les années 1970, entendue peu avant Noël dans une conférence dans le Jura : « L’Église, porteuse de la foi du Christ, existe depuis presque 2000 ans sur la terre. Qu’avons-nous fait de ce monde ? ».


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